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« Quête spirituelle, l’art de Bélasco est le fruit rayonnant d’une médiumnité toute simple. Dans ses œuvres, l’intuition poétique précède à l’alchimie du regard, et conduit à ces régions de l’âme où le temps est aboli, la musique sublimée, où l’esprit contemple d’éternels soleils, de lumineuses galaxies »

Roger Bouillot

M. Batier, Attaché des Affaires Culturelles, Directeur des Musées de Nice

Infra le grandezze delle cose che sono infra noi,

l’essere del nulla tienne il principato.

Léonard de VINCI

 

 

La peinture abstraite « gestuelle» de Belasco se rattache à la forme américaine de ce mouvement appelé «action-paiting». Tout comme Pollock, Bélasco utilise un automatisme psychique pur qui restitue et explicite le fonctionnement réel de sa pensée sans que la raison, la morale ou la recherche esthétique consciente puissent en contrôler la démarche.

 

Comme l’a pu écrire Joseph-Emile Muller en parlant de l’Art automatique, c’est «un art éruptif, violent qui jaillit directement des entrailles et qui traduit la réalité profonde, inconsciente de l’être ».

 

Entre 1910 et 1914, le russe Wassily Kandinsky peignait déjà en expressionniste, traduisant ainsi les élans de sa sensibilité.

 

Bélasco est le peintre de l’aventure humaine et de ses avatars. Lorsqu’il agite son bras, sa main et son pinceau, cet artiste révèle en même temps, dans sa spontanéité, son âme féconde de spiritualité. Sa peinture informelle, instinctive cache même une science du métier, mais tout en elle est « image ». Avec l’image, il existe une « pensée plastique » à travers laquelle s’élaborent des systèmes interprétatifs du monde qui nous aident à mieux l’appréhender.

L’espace pictural, l’homme s’y sentait jusqu’ici chez lui, à son aise ; il s’y regardait dans un miroir. Avec l’apesanteur et l’abstrait, il est à la recherche d’un nouvel espace cosmique et spirituel qui le dépasse.

 

Le surréalisme était insurrection du rêve dans le royaume du rationalisme. Cette fois, avec Bélasco, le geste lui-même est autonome, indépendant de la domination de l’intellect. Le geste n’est plus que générateur d’art pur, encore que le mot « art » s’entende ici dans son sens d’instinct créateur, d’intuition onirique et non plus dans celui de système conventionnel de la création conceptuelle et théâtrale.

 

Paul Valéry  n’a-t-il pas écrit de l’idée d’Inspiration : «ce qui ne coûte rien est ce qui a le plus de valeur ; ce qui coûte est ce qui a le moins de valeur ». N’est-il pas question ici du monde intérieur de la pensée intuitive ? L’artiste Bélasco fixe les valeurs spatio-temporelles de l’utopie, de l’ « homme imaginant » d’Henri Laborit.

 

La peinture de Bélasco justifie l’analyse lucide du critique Pierre Restany publiée dans la revue Domus de septembre 1969 : « De tels gestes picturaux sont hautement significatifs et débouchent sur une para-psychologie qui s’exprime sans relais culturels à travers un para-langage ». « L’art, pour quoi faire ? » se demande Michel Ragon. L’artiste est un « découvreur » de nouveaux signes. Il nous fait ressentir la notion de relativité.

 

Dans sa présentation de l’exposition « rythmes colorés» consacrée à Survage, Claude Fournet nous parle évidemment des rythmes et de la couleur, mais aussi de l’abstrait et des signes. Il explicite savamment et clairement la complexité de la création d’un para-langage.

 

On ne peut résister au besoin de le citer, hélas fragmentairement, en pensant à Bélasco :

« De la représentation on passe à l’écriture ; le constat devient autre, et c’est précisément de ce démarquage qu’une nouvelle grammaire est à constituer : l’effort «abstrait» correspond alors à la possibilité d’un «en soi » des signes qui ne tiendraient plus à leurs valeurs reconstitutives mais à une flagrance plus élémentaire, bref à ce que Kandinsky, définit comme un besoin « capable de peser la couleur sur ses subtiles balances, etc…» et plus loin, se référant toujours à Kandinsky. Fournet écrit : « Tout anecdotisme est à écarter puisque c’est d’une naissance élémentaire du rythme qu’il s’agit et, à travers la couleur, de son droit fantasmatique à l’apparition où on l’introduit » et encore : « Un rapport à la temporalité (à ses scansions à ses rythmes) est affirmé qui appelle une lecture, l’œuvre d’art n’étant plus l’objet que l’on détermine comme tel (métaphysiquement ou théologiquement) mais une proposition de la durée, une complication de l’espace selon l’arbitraire d’un signe ».

 

Démiurge, Bélasco n’est-il pas un peintre « significateur », créateur d’un univers cosmique où se bousculent des nébuleuses et des étoiles en train d’exploser ? Bélasco n’est pas que « mouvement » et rythme cosmique ; il est également l’architecte de « structures ». Comme l’écrivait Michel Tapié, directeur du Centre International de recherches esthétiques, dans « Itinéraire de Bélasco » :

 

« … dans les œuvres les plus récentes, nous avons des propositions qualitatives d’espaces artistiques autres, témoignant dans ces zones très abstraites d’un raffinement de sensibilité, et c’est un fait essentiellement artistique d’installer des qualités d’un possible humanisme autre dans l’exploration des immenses possibilités ouvertes par les possibles propositions des axiomes de l’abstraction, c’est-à-dire des « espaces abstraits » acquis : sans entrer dans des détails artistiquement négligeables, il s’agit, dans l’aventure des «structures», du passage d’un tridimensionnel euclidien structuré rythmiquement par des combinaisons simples de nombres naturels et de leurs dérivés à la multivalence de la topologie générale (continuité, limites, voisinages) incluant les rythmes ensemblistes des nombres au moins réels, bien entendu qualifiés dans certains de leurs possibles dépassements artistiques et seulement là ».

 

L’art de Bélasco n’est peut-être qu’un jeu. Pourquoi pas ? Rien n’est-il plus tragique, en effet, que l’absence de jeu, l’absence d’art dans la vie ? Rien n’est-il plus ennuyeux qu’un aujourd’hui identique à hier et à demain ? Demain ce doit être l’espoir, le « futurible ». Comme l’a encore écrit Michel Ragon : « Le message des peintres et des sculpteurs précède souvent les mutations des autres arts. L’impressionnisme de Monet a précédé celui de Debussy. Le cubisme de Cézanne a précédé celui de Le Corbusier. Les « mobiles » de Calder ont précédé la conception d’une « architecture mobile » de Yona Friedman et la musique aléatoire de John Cage ». L’art d’aujourd’hui est ce que sera l’homme de demain.

 

L’art ludique et gestuel de Bélasco, dans ses représentations irrationnelles plastiques, n’évoque-t-il pas l’amour, seule réalité qui soit, comme l’art, sensorielle, spirituelle, esthétique et éthique ? La vérité est qu’art et amour ne font qu’un.

 

Quand on voit la personne et l’œuvre de Bélasco, on ne peut que se convaincre de cette identité mathématique comme d’une évidence axiomatique.

 

M. BATIER

Attaché des Affaires culturelles

Directeur des Musées de Nice

1975

Alain Bosquet, poète et écrivain, Académie Française

Bélasco s’efforce de donner une apparence d’ordre à un flux ininterrompu de mouvements. Par une impulsion intérieure, il sait où et quand intervenir afin de donner au flux ininterrompu du mouvement un aspect systématique.

 

Avec le temps, une image floue, mi-personnelle, mi-situationnelle se dessine.

 

Il existe deux types de mouvements dans les coups de pinceau de Bélasco : un mouvement direct et un mouvement de questionnement.

 

C’est l’expression de la nécessité de garder notre conscience et notre centre de gravité en nous, alors que nous nous ouvrons au mouvement et à l’infini.

 

La vraie nature d’une molécule ou d’un atome est qu’il peut s’échapper et disparaître devant nos yeux. Le mouvement, comme chez Bélasco, doit se faire avec une certaine fatalité, c’est une nécessité pour soulager la souffrance. Chez elle, il s’accompagne d’un sentiment de tendresse.

 

Entre la cellule et le neutron, entre l’aube et le crépuscule, elle nous attend et nous accompagne dans son univers.

 

Alain Bosquet, Grand Palais, Paris, 1978

Bélasco ou les interrogations de la matière

 

La matière se touche, se voit, se pèse, s’écoute. Les sens la reçoivent, sans qu’il y ait besoin de lui trouver une intention. Une peinture comme celle de Bélasco, qui est au service de la matière, pourrait se contenter de sa simple et grave présence.

 

Elle est l’étape première d’un univers qui vit et ne cherche pas de signification autre que physique. Dès l’instant où, de surcroît, on veut la mettre en mots,  on lui confère une responsabilité de pensée et de conception. Il est rare qu’un peintre de la matière puisse supporter cette épreuve de la mise en mots. Le miracle – disons : la surprise durable – de Bélasco, c’est qu’elle se plie à cet exercice, et même qu’elle le suscite.

 

Il en résulte une riche et étrange dualité : nos sens nous révèlent pleinement ce qu’est cette peinture et, en même temps, notre esprit lui découvre des dimensions parfaitement en accord avec elle. La matière s’analyse ainsi dans sa vérité évidente, et permet des prolongements ivres dans le domaine des spéculations poétiques.

 

Si on voulait être rigoureux, on dirait que la matière est mixte, qu’elle invite la laque, qu’elle exige aussi des fonds d’acrylique, bref qu’elle est de densité variable. Avec autant d’objectivité sévère, nous constatons que Bélasco lui imprime des mouvements divers, qui vont de la promenade de la main à la rage fulgurante : il n’est rien qu’elle s’interdise dans ce qui pour elle doit être l’exaltation simultanée du geste, de la maternité de l’œil, de l’enfantement dans une sorte de don de soi qui ne se demande pas dans quelle forme il va trouver sa réalisation – et qui pourtant la trouve avec un instinct assez infaillible. Cette force, cet abandon à créer, on ne les acquiert pas, et il n’est pas certain qu’on puisse les cultiver : ils sont naturels et innés.

 

La première constatation est donc d’un élan vital. Mais un mouvement unique ne saurait suffire à Bélasco : dans la même toile, quel que soit le premier don, il est suivi par d’autres rythmes, d’autres éclosions. C’est peut-être le signe le plus original de la gestation dans chacune de ses œuvres : la vitesse initiale ne s’accepte que si elle est assurée d’une seconde vitesse – une contre-vitesse même – et parfois d’une troisième et d’une quatrième pulsations. L’univers appartient à des moteurs complémentaires ou en désaccord entre eux : Bélasco le démontre avec ses ivresses au halètement imprévu.

 

Que sont les formes ? Ici non plus, il ne s’agit pas encore de fabuler, ni de traduire trop lyriquement ce qui se passe, qui se passerait peut-être. Les formes sont compactes, elles se serrent les unes contre les autres ou, quelquefois, elles donnent le sentiment de se remplacer les unes les autres. Elles suggèrent leur fuite ou leur permanence car elles sont, que Bélasco le veuille ou non, de caractère géologique. Blanches – ce qui leur arrive souvent – elles se plaisent à leur propre lenteur lactée. Brunes, elles ne cachent pas leur éruptivité. La peinture accepte ses propres hasards : des bulles, de l’écume, et par la suite des graphies, celles là plus volontaires. On découvre aussi bien des treillis, des glacis, des lieux vitrifiés, des filaments qui jettent comme un mystère supplémentaire dans le tableau.

 

Pourquoi, enfin, se priver de définir la signification rêveuse et métaphysique de cet art ? Les éléments cosmiques fêtent ici d’interminables noces, tantôt heureuses, tantôt voraces. Où sommes nous, et à quelle époque ? Il est important que ces questions se posent à nous, car elles nous demandent de nous interroger, alors même qu’elles ne nous offrent aucun réconfort facile. Être poète – on a compris que Bélasco l’est pleinement – c’est fondre dans une sorte d’état de danger de cosmos, comme au premier jour de la création, et comme au dernier.

 

C’est dire que le lyrisme-là se sait impardonnable. Les comètes et les galaxies se télescopent, encore qu’elles ne veuillent admettre leur identité de comètes ou de galaxies. Les terres – mais situés dans quelle système solaire ? – sont en éruption, à moins que ce ne soit qu’une perpétuelle menace. Il n’y a de certitude dans cette atmosphère que dans une manière de perpétuel affolement.

 

On s’interrogera encore sur la température de ces matières, pour constater qu’elles reculent les limites des mesures cartésiennes. Les métamorphoses – incessantes – ne promettent aucune image stable, bien que celle-ci soit quelquefois au seuil de sa propre délimitation. C’est que la volonté et le choix ne sont jamais absents de cet opéra de l’espace.

 

Entraînée dans son élan, Bélasco sait où et à quelle minute il lui faut intervenir pour donner à l’épopée du mouvement un semblant d’ordre. On voit alors apparaître des semi-personnages, des quasi-situations. Le geste peut être ainsi de deux natures :  immédiat et à échéance. C’est que notre part de conscience et de gravité raisonnante ne doit pas manquer à notre ouverture sur l’inconnu et sur l’infini.

 

Nous sommes la molécule ou l’atome d’un univers dont l’honneur est de nous échapper, ou de sans cesse se refaire sous nos yeux. Encore faut-il – comme chez Bélasco – que ce soit par une sorte de nécessité qui sache vaincre l’angoisse. Ses interrogations de la matière comportent une sympathie sensuelle : là-bas, très loin, à moins que ce ne soit en nous, entre cellule et neutron, des aubes et des crépuscules nous attendent dont nous n’avons pas à avoir peur.

 

Alain BOSQUET, Académie Française, Avril 1975

Roger Bouillot, journaliste, écrivain

L’Art de Bélasco

 

Deux forces primordiales caractérisent l’art de Bélasco : la musique qui semble toujours animer sa peinture, et une quête spirituelle qui en est le but ultime, mais aussi le sens premier et sa recherche toujours constante.

 

André Breton détestait la musique « parce qu’elle est indéterminée… » mais je crois que les peintures de Bélasco auraient fort bien pu le faire changer d’avis. Elle est pour moi l’un des peintres les plus proches de ce que l’on appelle la musique pure, et suggère, par le filtre de l’œil, les masses orchestrales si raffinées propres aux musiciens impressionnistes, les épures architecturales des compositeurs contemporains, ou les grandioses symphonies postromantiques. Nombre de ses oeuvres sont l’écho plastique de partitions majeures de l’histoire de la musique : Stravinsky (le « Sacre » bien sûr), Varèse, Messiaen, Bruckner, Chostakovitch.

 

Cette remarque toutefois concerne un peu moins la dernière évolution de son travail depuis une bonne dizaine d’années, la musique l’inspire et la guide toujours, mais il s’agit maintenant d’un climat plus diffus, plus intériorisé, à mesure que sa peinture s’est, davantage encore, imprégnée de religiosité. Cette évolution majeure reflète, très subtilement, la découverte de l’extrême orient, et principalement la culture et la civilisation du Japon, à commencer par sa fascinante spiritualité.

 

Le Japon a fortement imprégné de son omniprésence spirituelle la peinture de Bélasco, sa pulsion créatrice s’est teintée d’un raffinement très spécifique, sa palette élargie s’est densifiée. Le trait le plus immédiat de son art, cette communion primordiale avec l’univers, se conjugue maintenant à ce sens de l’immanence que la pensée Zen nous transmet avec, par exemple, ses admirables jardins de pierres et de sable.

 

Quête spirituelle, l’art de Bélasco est le fruit rayonnant d’une médiumnité toute simple. Dans ses oeuvres, l’intuition poétique précède à l’alchimie du regard, et conduit à ces régions de l’âme où le temps est aboli, la musique sublimée, où l’esprit contemple d’éternels soleils, de lumineuses galaxies.

 

Roger BOUILLOT

Homme de radio et critique d’art

Collaborateur des revues « L’amateur d’art », « Arts » et « L’Oeil »

12 février 1990

Robert Charroux, journaliste, écrivain et essayiste

La somptuosité de l’œuvre de Bélasco frappe en plein cœur et émerveille d’imaginations indécises. C’est l’impression dominante de la première rencontre, instantanée, irrépressible, branchée directement sur le complexe sensoriel.

 

Un grand « bang » toujours original et permanent, géniteur de miracles : nébuleuses des autres mondes, forêts enchantées, vaisseaux de haute mer, fleurs de jardins imaginaires, grimoires ä formules magiques des idéations impénétrables et des secrets qu’elle n’ose révéler.

 

Ces structures apocalyptiques, ce choix du hasard, supposent un état de grâce et, peut-être, la rouerie d’une Lilith qui veut exacerber le désir des hommes en voilant son fantasme physique et en dénudant, pleine toile, les imaginations de son moi inconnu.

 

Robert Charroux

Francis B. Conem, journaliste, écrivain

Bélasco au service de l’émotion

 

Les poétiques arabesques, audacieusement cursives, du graphisme de Bélasco, où formes et couleurs constituent un tout ne s’apparentent guère aux graphismes volontiers pulpeux d’Odilon Redon, moins encore à celui d’un Moreau. Sans enthousiasme, point de création, tel est l’évangile de Bélasco. L’enthousiasme, je trouve ce mot merveilleux, écrivait Bernadette Bariteau. De fait, il est souvent le mot-clé qui commande nos actions et dicte notre inspiration et nos réalisations.

 

L’œuvre de Bélasco, envoûtement, magie, vision prophétique, toute séduction et évocation mystérieusement indéfinissable, donne le sentiment d’une œuvre exprimée en toute liberté, ne répondant qu’aux lois non écrites de l’intuition et de l’esthétique. L’artiste éprouve le désir, si naturel en somme, de recréer le monde à l’image de ses rêves, d’où l’insolite et le poétique de la réalité de cette œuvre, d’une vive sensibilité. N’est-ce pas précisément à cela que se reconnaît l’artiste ?

 

Francis B. Conem

Gérard Coste, Conseiller culturel, Ambassade de France au Japon

Les trois dimensions éclatent sous la pression d’un mouvement qui semble jaillir du fond même de la toile. Les couleurs tourbillonnent, les formes s’entrechoquent : Bélasco est le peintre moderne de l’apocalypse.

 

Ces séries d’explosions n’ont pourtant rien de lugubres : la puissance et la fougue qui leur ont donné naissance saisissent le spectateur et stimulent son imagination.

 

La présentation des œuvres de Danièle Bélasco dans la galerie MIKIMOTO va permettre au public japonais de se familiariser avec un aspect particulièrement brillant de la peinture française contemporaine.

 

Je remercie vivement les organisateurs de cette exposition et lui souhaite le meilleur succès.

 

Gérard Coste

Conseiller Culturel

Ambassade de France au Japon

Frank Elgar, journaliste et critique d'art

Ces « FANTASMAGORIES » désignent avec pertinence des peintures traduisant en toute liberté des songes dont on ne saurait dire qu’ils sont tout de douceur ou de sérénité, tant une fiévreuse exaltation semble emporter le pinceau de l’artiste.

 

Aussi bien, les titres donnés par Bélasco à certaines de ses toiles, qu’elle expose à la galerie Drouant, indiquent-ils le sens de son inspiration : « Tempête météorée », « Nuit de feu », « Symphonie des ténèbres », « Au cœur de l’orage ».

 

Les grandes compositions graphiques en noir et blanc sont traversées d’une fougue lyrique et comme soulevées d’une mâle énergie, ce qui surprend d’autant plus de la part d’une jeune femme qui, d’ailleurs, n’abandonne rien dans la vie de ses attributs naturels.

 

Quand elle est tentée par les prestiges de la couleur, une sorte de poésie onirique émane de ces tons fluides, de ces nuances fugaces et irisées, de ce langage chuchoté comme un aveu sur une lèvre qui tremble et qu’on pourrait qualifier de « surréalisme abstrait ».

J’ignore s’il s’agit de sa première exposition à Paris. Elle y révèle, en tout cas, une volonté impérieuse et des dons rares de peintre.

 

Frank Elgar, « Des Idées, des Arts, des Lettres, des Sciences », Revue « Carrefour »,‎ 1972

Jean Forneris, Conservateur Adjoint du Musée des Arts Jules-Chéret, Nice

Pour saluer Bélasco… telle qu’en elle-même…

 

« La dispensation de l’être un enfant qui joue, qui pousse ses pions sur un damier ; c’est à un enfant qu’appartient la royauté« .

Héraclite, fragment 52,
traduit par Heidegger (in Le principe de raison)

 

Être une et plurielle, unitive et mouvante, telle s’affirme Bélasco en la profusion germinatrice d’une création exigeante qui masque le nécessaire effort organisateur pour engendrer le jaillissement final spontané. Ainsi, ce processus est le partage de nombreux artistes, les plus authentiques, qui synthétisent magistralement les plus minutieuses étapes de la création et de l’éclatement terminal, à condition de ne point oublier que chaque monde de Bélasco est un espace en devenir : héraclitéenne et non parménidienne, elle a choisi la précarité fluctuante et protéenne du Devenir au dépens du monolithisme de l’Être.

 

C’est pourquoi Bélasco nous introduit alors dans un espace-temps qui lui est propre et qui nous « conte » sa cosmogonie qu’en poète elle parvient à nous faire partager au-delà de l’aspect privatif d’un rêve tout intérieur. Or, la cosmogonie nous renvoie toujours et à, l’Origine – le surgissement – et la Téléologie – une fin ou des éternités qui la contredisent – en une circularité qui est celle du mouvement des planètes, des tourbillons nucléaires et du processus vital. Bélasco fait pourtant signe vers la parole mythique, celle des Origines, celle qui transcende le temps ou qui l’apprivoise – presqu’une apprentie sorcière ! – et elle nous rend familiers les espaces infinis dont le silence effrayait Pascal. Pour revenir au « métier » – qu’on me pardonne ce terme – qui donc nous dira les secrets de l’alchimie chromatique des superpositions de glacis aux nuances irisées dont l’art de Bélasco est le creuset ? Là encore l’artiste fait œuvre de poète et son univers est un chaos dont elle est l’ordonnatrice suprême, maîtrisant à la fois la nécessité la plus contraignante et la contingence la plus innovante.

 

Sans doute, peut-on éventuellement situer Bélasco dans la vaste trajectoire historique qui va des ultima opéras du maître Giverny à l’orée de l’Abstraction lyrique. Mais elle échappe à toute taxinomie arbitraire et réductionniste, et l’erreur serait de la penser en termes de pure non-figuration. N’avons-nous pas dit qu’elle bâtissait des mondes ? Sa démiurgie cosmogonique récuse donc le strict refus de l’« objet » pour nous mieux réintroduire dans un univers sublime où elle règne en Maître.

 

À la limite, Bélasco nous invite à déborder la structure « monde ». Sa rêverie est-elle la constitution précaire d’une structure ouverte à l’aube d’un nouveau monde ? Ses mondes en gestations, dont elle nous fait pressentir la présence cryptique, sont issus de son réel pouvoir de variation(s) fantastique(s). Ici Bélasco rejoint la pensée qui, selon les termes de Heidegger, est « hors de l’ordre ». Tout cosmos imaginable transgressé, il y a peut-être encore un cadre, un « monde », qui assure la pensabilité de la « chose » pensée. Bélasco peut-elle donc rêver – pouvons-nous rêver – au-delà de toute cosmicité ? Le peintre ne nous apporte aucune réponse, car tel n’est point son propos. La question demeure. Bélasco nous donne seulement à rêver et, ce faisant, témoigne avec une force peu commune des possibilités qu’a l’esprit de devenir quoi que ce soit.

 

Le cosmogonisme renvoie en définitive non seulement à chaque œuvre, dont les titres nous donnent à rêver et ici nous pourrions éventuellement faire appel à la méditation bachelardiennne sur les Éléments – mais encore au devenir même de son œuvre dont je voudrais saluer ici les dernières productions qui ne sont point heureusement les productions dernières.

 

Jean Forneris

Conservateur Adjoint du Musée des Arts Jules-Chéret, Nice

18 juillet 1986

Shig Fujita, journaliste

Bélasco reflète le tempérament français

 

 » Quand je me sens calme, je peins en bleu ; quand je suis pleine d’enthousiasme, j’utilise du rouge flamboyant« , a expliqué Danièle Bélasco, une peintre française qui a tenu sa première exposition personnelle au Japon à la galerie Mikimoto de Tokyo au début du mois.

 

Ses cheveux roux semblent symboliser le feu – parfois atténué mais toujours présent – que l’on peut voir dans toutes ses peintures, qui ont été décrites comme l’apocalypse de l’art moderne par Gérard Coste, conseiller pour les affaires culturelles à l’ambassade de France.

 

Lorsque j’ai dit que certaines de ses peintures me rappelaient le flamenco ardent des gitans, elle a souri et a répondu : « Mes peintures sont fortes et violentes et sont le reflet de mon tempérament français« .

 

Il y a très peu d’êtres humains dans ses œuvres, et ceux qui apparaissent ont l’air d’être les seuls à rester sur terre. Elle a déclaré : « C’est parce que je sens que la vie elle-même est éphémère et menacée, que cette époque est menacée« .

 

Beaucoup de ses tableaux présentent des couches épaisses, presque en relief, et elle a expliqué que c’était pour donner de la force aux œuvres et que les couches supérieures sont transparentes pour que « le feu de l’intérieur puisse brûler à travers« .

 

Bélasco a déclaré que ses œuvres étaient à l’origine surréalistes, mais qu’elle était passée par plusieurs étapes pour développer son style actuel.

« Mes peintures sont une expérience continue« , a-t-elle dit. « Lorsque je termine un tableau, je suis déjà en train de commencer l’œuvre suivante. Pour moi, chaque peinture est le début d’une nouvelle expérience« .

 

Elle vit à Paris mais aime voyager. Au cours des 30 années qui se sont écoulées entre 1950 et 1980, elle a voyagé dans plus de 30 pays, notamment au Cambodge, en Corée du Sud, à Hongkong, en Inde, en Thaïlande, aux Philippines, en Afrique du Sud, en Rhodésie, au Zaïre, en Côte d’Ivoire, en Tunisie, en Égypte, au Brésil, au Pérou, aux États-Unis, en Italie, en Finlande, en Grande-Bretagne, en Suisse et en Grèce.

 

Elle emporte des appareils photo chaque fois qu’elle voyage. « Quand je n’ai pas le temps de faire des croquis, je prends des photos avec mes appareils« , dit-elle. « J’aime particulièrement prendre des photos du ciel et de la mer. La dernière fois que j’étais au Japon, j’ai photographié de nombreuses scènes de mer à Kyushu et dans la mer intérieure de Seto. J’aime les scènes de nuit et j’ai pris d’innombrables photos de pêcheurs de Kyushu la nuit« .

 

Bélasco fait penser à Elizabeth Taylor et a l’air du type qui aime les fêtes, mais elle dit : « Je n’aime pas les foules ; j’aime la solitude. Mais la plupart des gens croient à tort que j’aime les foules. Comme je suis mariée, je dois aller à des fêtes avec mon mari, même si je ne les aime pas« .

 

À propos de la peinture et des peintres, elle a déclaré que le sort des peintres est qu’ils sont, dans la plupart des cas, morts lorsqu’ils sont enfin reconnus.

 

Elle a exposé plus de 70 fois à Paris, Pittsburgh, Houston, Tokyo (Musée national d’art moderne, 1965-68 et 1970-77), Copenhague, Luxembourg, Téhéran, Milan, Berlin, Londres et Helsinki. Elle participe actuellement au Salon d’Automne à Paris.

 

Shig Fujita

Asahi Evening News

22 Novembre 1980

Pierre-Yves Guillen, auteur et écrivain

Bélasco ou la femme-foudre

 

Elle est rousse comme un soleil de minuit, elle piaffe comme un alezan pur-sang, elle bouge, elle rit, elle mange du gingembre et elle jour du pinceau et de la palette comme Vulcain joue avec la foudre, la mer et les nuages.

 

D’ailleurs, Armand Lanoux dit d’elle qu’elle est toute d’explosion.

André Parinaud dit qu’elle projette des explosions d’étoiles.

Alain Bosquet lui prête le pouvoir de donner à l’épopée du mouvement un semblant d’ordre.

 

Et moi, je la vois très bien, telle une amazone furieuse, doublée d’une héroïne wagnérienne tragique, je la vois très bien au fond des eaux d’un lac sombre et dont on sait que les tempêtes y sont terribles, guettant la foudre, la saisissant à pleines mains pour l’écraser, l’éparpiller et la modeler sur ce fond de sable qui vit s’éclater au cours des siècles tous les météores, météorites et autres comètes avec ou sans queue qui font trembler les enfants et les vieillards !

 

Et cela donne des tableaux, des toiles, des dessins semblant sortis de la main de la nature, si la nature était une femme ; d’ailleurs elle est femme, elle s’appelle Bélasco, et, après soixante-six expositions dans treize pays, vous attend dans la jolie galerie Ra à Paris, jusqu’au 13 Mai. Allez-y.

 

Pierre-Yves Guillain

Le Quotidien du Médecin

1980

 

Bélasco

 

Elle n’est jamais à Paris. Son passeport est un véritable annuaire ! Elle a vu tous les ciels et toutes les étoiles sous d’innombrables latitudes. Elle a plongé son regard dans toutes les mers, dans tous les océans. Quand elle prend sa palette, elle se souvient des comètes parcourant le ciel du Venezuela pour s’écraser dans la mer Morte, et de ses toiles jaillissent des éclaboussures de rencontres. Quand on en regarde une, on a chaud, on a froid, on a envie d’en approcher ses mains comme on le fait autour d’un braséro ; quand on se brûle, on les trempe dans la toile voisine où des océans glacés fument.

 

Bélasco est une femme qui cherche les continents perdus d’une fin de monde déjà arrivée. Elle connait tous les secrets de la création et des galaxies, elle parle en toute intimité avec les nébuleuses les plus lointaines, et son pinceau nous les rapproche. Lorsque ses yeux sont fatigués de regarder les mystères insondables de l’univers, ils regardent alors dans les entrailles des volcans sous-marins et ils y découvrent des Atlantides où Antinéa l’accueille.

 

Bélasco, donc, en compagnie de ses feux et de ses glaces est accueillie à son tour par la galerie Drouant, à Paris. Mais dépêchez-vous : Bélasco va vite rejoindre ses étoiles filantes. Elle n’y sera que jusqu’au 19 mars.

 

Pierre-Yves Guillain

Lydia Harambourg, historienne de l'art, critique d'art, écrivain et commissaire d'exposition

Bélasco

 

La peinture de Bélasco entretient des liens secrets avec les lois qui régissent le cosmos. Elle lui subtilise ses scansions, ses mouvements éruptifs, transpose ses structures, ses configurations, ses nébuleuses et ses galaxies en un langage pur. L’instinct d’une créatrice authentique et son intuition onirique explorent cet univers poétique.

 

L’artiste est à la recherche de signes pour évoquer de nouveaux espaces abstraits. Les formes se libèrent sur la surface progressivement apprivoisée. Les mutations érigent des paysages métaphysiques dans lesquels se reconnaissent des évocations des premiers jours de la Création. L’énergie sourd d’une matière interrogée dans sa complexité, travaillée jusqu’à obtenir par des glacis, des vérifications et des applications de feuilles d’or des images géologiques suggérant des phénomènes cosmiques aux résonances illimitées. Dans ce balancement où volonté et liberté impulsive se liguent pour pénétrer l’insondable, l’émotion jaillit sous la pression du désir d’écrire un trait, de jeter des taches, transfigurées par des interventions chromatiques d’un extrême raffinement, de laisser s’épanouir une forme, boursouflée où lisse comme le filament d’une comète.

 

L’artiste griffe, peaufine jusqu’au paroxysme lyrique souhaité. Nul doute que pour Bélasco la peinture soit initiatique. Chez elle, les voyages comme la musique jouent un rôle de catalyseur. La fréquentation du maître japonais Suzuki auprès duquel elle a travaillé a contribué à lui faire poursuivre son itinéraire plastique dans une direction spirituelle.

 

A la fois quête qui doit la mener vers l’absolu et interrogation sur une permanente anxiété, la peinture de Bélasco se renouvelle par des métamorphoses incessantes à l’unisson de celles des éléments fondateurs.

 

Lydia Harambourg

La Gazette de l’Hôtel Drouot n°34
28 septembre 2001
P.32

Sahoko Hata, journaliste et critique

Les Femmes, Le Cœur en flamme !

 

On n’a qu’une vie. Aussi veut on la vivre pleinement. Pourtant, le trajet est long et complexe. Encouragé par la façon de vivre des autres, on se rend mieux compte que chacun a sa propre vie.

 

Le Peintre Bélasco : Entre Deux Mondes

 

Les dessous de la Beauté

 

Lorsque je l’ai rencontré pour la première fois, j‘ai été impressionnée par sa beauté en pensant avec légèreté que c’était une vision parisienne. Elle était si éblouissante, j’ai eu le sentiment que c‘était une femme à part entière, mais je me rends compte maintenant que nos âges n’étaient pas si différents.

 

Cela se passait il y a déjà 40 ans. J’avais plus de 20 ans mais, j’étais naïve et je pensais que les personnes que je rencontrais en France étaient des adultes, et j’imaginai étrangement qu’il me faudrait avoir plus de 40 ans pour pouvoir les fréquenter sur un pied d’égalité. Ce n’étaient pas des impudents, mais des adultes équilibrés. Cela semblait peu de chose mais je pense que pour les Japonais, c’est un sujet très sensible et important. C’est ainsi que nous sommes influencés par la société et l’éducation que nous recevons.

 

A partir de ce moment, j’ai gardé le contact avec elle, cependant il existait une certaine distance entre nous. A cette époque, elle venait de se marier mais n’était pas encore peintre. Au fur et à mesure que les affaires de son mari ont pris de d’envergure, sa vie et ses relations ont complètement changé.

 

Son mari m’a confié un jour : « Ma femme, voyez-vous, me dit qu’elle veut chercher son chemin dans la peinture ». Ce fut un coup de tonnerre pour son entourage ; mais elle était depuis longtemps déterminée. Et après bien des péripéties, elle atteignit son but.

 

Née à Dijon, elle fut éduquée dans un monastère avant de venir étudier à l’école des Beaux-Arts. La deuxième guerre mondiale et la période d’après-guerre furent des moments difficiles pour tout le monde. Elle vendait des croquis aux ateliers de mode tout en apprenant à dessiner. Ce genre d’histoire est fréquente. Mais, étant très belle, je pense que c’est la raison pour laquelle on lui conseillait de devenir mannequin au lieu de vendre ses dessins. Je dis « je pense » parce qu’elle ne parlait pas d’elle-même, cependant c’était facile à imaginer. Par la suite elle est devenue mannequin pour plusieurs maisons et participa à des défilés de mode pour pouvoir subsister. J’ai assisté une fois à un défilé auquel elle participait. Elle était si chic dans son tailleur de Jacques Heim!

 

 

Une flamme loin d’être éteinte

 

Ses activités de mannequin lui firent rencontrer son futur mari. Leur fils unique devenu adulte, elle voulut réaliser encore une fois son rêve d’enfance. L’époque était au changement. Son mari accepta son rêve. Il était à la fois heureux et inquiet, mais voulu coopérer complètement. Il connaissait le caractère de sa femme et sa détermination à y mettre tout son cœur. Et avant tout, il l’aimait.

 

Néanmoins, il n’est pas facile de prendre le chemin de la peinture. Quand son mari se confia à moi, je ne sus que répondre. J’avais désiré moi aussi devenir peintre après la guerre, et mon rêve avait été brisé. Après avoir commencé à travailler, j’ai continué à dessiner un peu, mais en raison d’un problème d’espace, de matériel de peinture et par manque de temps, j’ai abandonné. J’avais des sentiments partagés parce que j’enviais sa décision d’autant plus que c’est un défi difficile à relever.

 

Il est important d’abord d’être déterminé mais cela ne suffit pas. Il faut aussi avoir de la chance. La vie est l’affrontement de ces deux facteurs. C’est à cette période-là qu’elle rencontra le critique d’art très connu, Michel Tapié. Neveu de Toulouse Lautrec, conservateur du Centre d’Art Moderne de Turin, et ce fut autour de lui qu’à Paris le monde de la peinture pris un nouveau départ.

 

« Tapié m’a encouragé et m’a conseillé de continuer ». Il avait l’air sévère en apparence, mais en réalité, c’est un être généreux et sans préjugés. Son attitude était sincère : Il emportait des œuvres de différents peintres chez lui, les observait, puis les critiquait tranquillement. Il observa ainsi mes œuvres et m’encouragea en disant « vous avez des possibilités ». Donc je peux comprendre que sa rencontre avec ce critique d’art d’exception ait donné du courage à Bélasco. Ses opinions ont transformé le monde de la peinture, dans l’expression professionnelle des arts dite « informels ». Le mouvement à l’avant-garde des classiques et de la peinture abstraite traditionnelle a énormément influencé la jeune génération de cette époque. Dans le monde du cinéma, c’était « la nouvelle vague » tandis que dans le monde de la mode, c’était la venue de jeunes créateurs et l’arrivée du prêt-à-porter. La conscience des femmes a naturellement changé et tout a commencé à évoluer. Cette histoire prend une tournure trop professionnelle pour que je la poursuite, mais il était très naturel que Bélasco ait été touchée par ces paroles.

 

« Le hasard se représente, et ce fut à ce moment-là que j‘entrepris pour la première fois un voyage au Japon. Ce voyage me troubla. Je fis l’expérience d’une culture totalement différente de la nôtre, et des murs s’écroulèrent. Toutes sortes de murs ».

 

Ne pas avoir dû abandonner son rêve

 

Elle s’appelle Danièle, son nom d’artiste est Bélasco. Après avoir été éduquée pendant et après la guerre suivant une éducation catholique sévère, elle se maria avec la personne dont elle était follement amoureuse. Elle a consacré toutes ses forces à construire une famille, et à la protéger. Attentive et bonne cuisinière, elle prit soin de sa famille. Conjuguant son désir de créer une famille heureuse où il fait bon vivre et poursuivre en même temps son rêve d’enfance, son désir de peinture abstraite. En fait, tout le monde a des occasions de rêver, mais dans la plupart des cas cela ne dure pas longtemps ou on échoue pour une raison ou une autre.

 

Pour une femme au foyer qui ne manque de rien, c’est plus difficile. Parce qu’être dans un milieu dit favorable ne signifie pas forcément être plein d’énergie.

 

C’est après la guerre que la société en France comme au Japon, a commencé à accepter que les femmes « travaillent ». Pourtant, la société n’accepte que difficilement une femme peintre mariée et dont le mari soutien sa famille. Elle s’attire des jalousies d’autant plus accentuées par sa grande beauté.

 

« C’est vrai, grâce à mon mari, je peux continuer. Je lui en suis reconnaissante. »

Mais, Bélasco est devenue un peintre professionnel. Elle se consacre à son foyer, à ses œuvres pour des expositions personnelles dans le monde entier et pour des salons, mais aussi à des affaires administratives diverses, et de négociation avec des galeries, dont certaines qui ne respectent pas les délais de règlement.

 

Dans la société française où l’unité du couple est importante, le rôle de la femme dans les relations sociales est primordial. Même si les invités sont des relations professionnelles de son mari et l’environnement pas toujours intéressant, le rôle d’hôtesse est indispensable. En fait, je pense que ces obligations sociales, font que le rôle de l’épouse n’est pas toujours des plus plaisant. Mais on ne peut pas rester chez soi et regarder simplement la télévision.

 

Bélasco veut s’occuper de son foyer de façon parfaite. Et sa sensibilité aux couleurs va jusqu’au choix de serviettes de table pour un dîner en tête à tête et au plaisir d’allumer des bougies.

 

« Quand mon mari quitte la maison le matin, je fais le ménage. Si on a prévu de diner à la maison le soir, je fais les courses. Et en début d’après-midi, je me prépare du thé dans un thermos, un sandwich et me rends à mon atelier ».

 

Cet effort de recherche s’est poursuivi pendant 30 ans, 7 heures par jour. Entre-temps elle est devenue membre du Salon d’Automne. Les artistes membres qui ont au début considéré ses toiles comme le passe-temps d’une dame excentrique n’ont pu que constater dans son style et sa volonté inébranlable, son style propre, peut-être caché derrière sa propre beauté. Mais ils ne l’ont pas pour autant reçue à bras ouverts. Plus on a du succès, plus les gens sont jaloux et méchants. De plus, la discrimination sexuelle existe.

 

Cela diffère un peu du Japon ; très courtois en apparence envers les femmes, des louanges admirables aux lèvres, mais c’est seulement la preuve que les hommes détiennent l’autorité absolue. Les femmes françaises le savent parfaitement et tout en pratiquant naturellement l’esquive, elles restent sur leur position. Ayant travaillé un peu en France, je peux comprendre sincèrement ce sentiment et dans une certaine mesure, je pense que la société japonaise d’aujourd’hui fait preuve de plus d’indulgence envers les femmes que la société Française. Il est évident que les démarches historiques, économiques et juridiques des femmes françaises ne sont pas aussi progressistes et libérales que le pensent les femmes japonaises. C’est en le constatant que j’ai pensé à écrire mes articles.

 

 

La femme « réversible »

 

« Nous, les femmes, nous sommes réversibles, lorsque nous essayons de faire quelques choses. C’est-à-dire qu’il faut vivre la vie « recto verso ».

 

Si vous êtes femme, ces paroles de Bélasco doivent particulièrement vous toucher. Après son ménage du matin, elle se rend à son atelier où l’attend un autre monde. Elle parcourt un livre, écrit un poème, ou écoute de la musique. Entreprend d’autres activités, puis elle prend imperturbablement ses pinceaux. Là, la dimension où elle s’inquiète d’une tache sur la cravate de son mari ou de la préparation du dîner n’existe plus. Désirant s’évader, elle se promène dans un univers inconnu, essayant de trouver de nouvelles techniques. C’est une telle joie de découvrir un avenir dans le monde de la peinture, mais cela provoque aussi une souffrance incessante, et Bélasco essaie d’exprimer ces sentiments sur ses toiles.

 

Pourquoi ne peut-on pas se satisfaire de sa situation alors qu’elle ne comporte aucun désagrément ? La question est posée. Alors, pour quelle raison les femmes dites sages s’arrêtent-elles arrivée à un certain âge pour regarder en arrière et réfléchir à savoir si elles ont eu raison d’avoir vécu ce qu’elles ont vécu ? N’importe qui peut se poser cette question. Il y a peut-être des intensités différentes dans cette question mais on ne peut pas éteindre le feu de la flamme qui couve au fond de son cœur. Ce petit feu peut apparaître et prendre différentes formes. Pour Bélasco, c’est la peinture. Elle cherche le feu de l’univers par l’intermédiaire de la peinture. Serait-ce Dieu ? Dieu peut-il faire brûler la terre un jour de colère ? Aujourd’hui, les hommes sont trop absurdes. Il y a tant de colère dans le monde qu’elle peut continuer à dessiner.

 

Continuer

Revenant de l’atelier qui se trouve dans un bâtiment annexe (où vécu Kandinsky), elle m’accueille dans le grand salon de son appartement. La Seine coule au-dessous de ses fenêtres et les bateaux de course glissent à la surface de l’eau aux couleurs du crépuscule. Soudain, rompant le silence, sa petite fille, étudiante à l’université, entre dans le salon. Enfant du fils de Bélasco dont elle dû s’occuper au divorce de ce dernier. Cela n’alla pas sans difficultés mais cette jeune fille de 18 ans n’est pas coupable. Elles sont maintenant complices et discutent librement de sexe et du Sida. Sa petite fille ayant un fiancé, il faut la renseigner clairement. Sujet sur lequel Bélasco a des idées très avancées.

 

« Notre génération, avait un idéal amoureux : le romantisme. Un garçon confiait son cœur à une rose. Aujourd’hui, les jeunes sont pressés. Cependant, ils ne sont pas assez renseignés sur le plan pratique. »

 

Il nous manque au Japon cette façon de regarder clairement la réalité. Par exemple, une grand-mère japonaise parle-t-elle librement de sexe à sa petite-fille ? A présent, la drogue et le Sida ne sont pas aussi présents au Japon qu’en France et la population japonaise fait semblant de ne pas en avoir conscience. Cela sera peut-être trop tard lorsque nous nous en apercevront. Et Bélasco de conseiller judicieusement à sa petite fille de ne pas porter un T-shirt et un short pour rendre visite à son fiancé.

 

 

Son mari nous rejoint. Il est énergique et plein d’idées. A peine assis il a une idée, celle d’aller au restaurant, car il sait très bien que son épouse est bien fatiguée. Ça fait plaisir à Bélasco et en même temps on sent une certaine réticence. Mais Bélasco, ou plutôt Danièle, a des principes et finalement accepte. C’est sa façon d’exprimer son amour.

 

Plus grand que la mer. C’est le ciel.

Plus grand que le ciel. C’est l’âme.

 

C’est la partie d’un poème qu’a écrit Bélasco dans un coin de son cahier. En jouant un double voir un multiple rôle, elle continue de prendre ses pinceaux dans le temps et l’espace qu’elle s’impose, en cherchant la flamme de son cœur ; la flamme de son univers.

 

Sahoko HATA

Best International

1995

Pierre Imbourg, journaliste et critique d'art

L’œuvre de Bélasco, envoûtement, magie, vision prophétique, toute séduction et évocation mystérieusement indéfinissable donne le sentiment d’une œuvre exprimée en toute liberté, ne répondant qu’aux lois non écrites de l’intuition et de l’esthétique.

Œuvre d’une vive sensibilité.

 

Pierre IMBOURG

Revue « Amateur d’Art »

Hirohide Ishida, Ministre japonais

À l’occasion de l’exposition « Bélasco »

 

La peinture crée un nouveau monde de beauté, inspirant au spectateur des pensées et des émotions sans fin.

 

C’est avec grand plaisir que nous présentons la première exposition solo au Japon de Danièle Bélasco, une femme peintre qui attire l’attention comme étant une nouvelle vague de la peinture française.

 

La peinture s’est imposée comme un symbole culturel durable. C’est le seul échange culturel qui ne nécessite pas de paroles.

 

Danièle Bélasco est plus enthousiaste que jamais à propos de son exposition au Japon. Elle a ajouté de nouvelles œuvres à ses propres chefs-d’œuvre. L’exposition comprendra environ 70 œuvres. Son travail a été bien accueilli dans plus de 30 pays. Son esprit fort et ses émotions vives se reflètent dans son travail.

 

Hirohide Ishida

Président de L’Association Culturelle Internationale

Armand Lanoux, écrivain, Académie Goncourt

La nuit lumineuse de Bélasco

 

De sa terrasse accrochée dans les gradins de Villefranche, une femme jeune et belle regarde la lune se lever sur le cap Ferrat, enfoncé dans la mer indigo. Elle aime l’astre, elle aime la nuit. Elle braque sur le satellite une lunette qui n’a rien de celle des nécromants. Le monstre jaune et violent du ciel prend sa dimension et dilate ses caps, ses mers, ses enfers. Elle pourrait être irlandaise, cette femme mince aux yeux clairs, par la flamme rousse des cheveux et cet amour de la nuit et de son peuplement. Elle peut être aussi sorcière. Elle est certainement fille d’lsis.

 

Elle est peintre. Elle s’appelle Bélasco et elle veut posséder la nuit. Chacun ses chimères. Celles de Bélasco sont très anciennes. Elles remontent au début des « civilisations », quand ses sœurs lointaines gouvernaient !’humanité à peine sortie du nomadisme, que les hommes n’étaient que l’inutiles abeillauds, que Dieu était au féminin et son astre la lune.

 

Si certains peuvent lire dans la peinture puissante de Bélasco les évidents accents cosmiques que Catherine Tolstoï a su si bien dire dans ses haï-kaï d’Occident : « Une chute d’eau à l’infini renverse les étoiles », on y trouve aussi quelque chose qui n’illustrerait pas si mal les voyages interplanétaires de la science-fiction, l’imagerie d’une bergère d’avenirs, en somme, mais ce n’est pas dans ce sens que cette aimable sorcière voyage, c’est plutôt l’autre quatrième dimension, celle du passé et des profondeurs qu’elle déchiffre en elle, sous la lueur douce et presque maléfique que diffuse la grande médaille d’or des empires, quand les Mères avaient chassé Adam et le Soleil.

 

Bélasco est un peintre, une fable, notre histoire.

 

Armand Lanoux

de l’Académie Goncourt, 1975

 

Bélasco

 

Une jeune femme couleur de feu aime la nuit. Elle l’apprivoise. Cette nuit, des étoiles la trouent, qu’elle voudrait dérober. Japon ou Singapour, Angola ou Égypte, Pérou ou States, le motif demeure, la guerre du jour et de la nuit, l’argument du ballet pictural que nous offre Bélasco.

 

La nuit de Villefranche déploie ses noirs sans nombre. Toute figuration humaine s’évanouit. Les carcasses structurales remontent. Peinture ? Certes, Tachiste ? Évidemment. Mais surtout prédation, agression, viol, forcerie, possession cosmique. La fragilité de la femme n’a ici aucun sens. Cet art dévore. Un peu plus et c’est le comte Dracula ! Dès que paraît Bélasco, la terre bout, brûle, fond comme le goudron, la lave ou le plomb.

 

Le noir et le blanc règnent souverainement sur cette peinture. Les noirs, les blancs. Bélasco conte leur guerre, une gigantomachie où les autres couleurs n’apparaissent plus que comme des servantes muettes.

 

Sur fond d’aniline aux intensités de science-fiction, comme la « vraie vie » n’en montre qu’aux abords des grandes raffineries ou sur les rives de la Mer Morte, Bélasco étale ses vernis, complote ses frottis, caramélise ses laques orientales. Sorcière, elle apprivoise le hasard.

 

Elle aime Gustave Doré, et ses chevauchées drolatiques, Gustave Moreau, l’enchanteur kitsch, Max Ernst, l’oiseleur de la cruauté, Léonor Fini, la bergère de monstres. Cette rousse fille d’Ulalume eût intéressé Edgar Poe, autant que sa peinture.

 

Les titres avouent les intentions des peintres. Du moins, celles qui sont conscientes : L’épave ensorcelée, Schisme cosmique, Ainsi parlait Zarathoustra, Un magnifique orage… Ils affirment poésie et philosophie. Mais le peintre remet le poète à sa place : toutes sont des compositions.

 

Il y a de la rigueur chez cette voleuse de fantômes. Nous sommes loin du figuratif ? Je n’en crois rien. Bélasco ne peint pas les paysages, mais les émotions qu’elle ressent devant eux. Ce sont des émotions violentes et domptées que nous transmet cette sorcière de la nuit.

 

 

Armand LANOUX

de l’Académie Goncourt

Gerhard Leo, journaliste et écrivain

Poésie des sphères, légende des espaces, en une ivresse vertigineuse, ses toiles nous retracent la permanence de l’Être, malgré ces fluctuantes, grâce à ces mouvances… au rythme des fluides, des flux et des reflux…

 

Gerhard Leo

1996

Jacques Médecin, Député-Maire de Nice, Président du Conseil Général des Alpes-Maritimes

1975 étant l’Année de la Femme, la Ville de Nice, dans le cadre du Festival du Livre, ne pouvait qu’accueillir en sa galerie les créations magistrales d’un artiste féminin témoignant d’un vigoureux talent aux possibilités multiples.

 

En présentant un ensemble imposant d’œuvres de Bélasco, la galerie des Ponchettes fait découvrir au public de la Côte d’Azur un des aspects les plus vivants de l’art des trente dernières années : œ que l’esthétique internationale qualifie d’Action Painting où se rejoignent les influences de l’abstraction lyrique et de l’automatisme dadaiste puis surréaliste. Notre cité, où tant de créateurs modernes trouvèrent un lieu d’élection, se doit de s’ouvrir aux formes les plus éminentes de l’art actuel.

 

Cependant, ce qui anime notre délectation, ce ne sont point tellement les faveurs passagères de la mode. C’est le fait que l’art de Bélasco prend sa source non dans le présent, mais dans le sans mémoire, l’Immémorial, seul capable de rassembler la structure tripartite du temps. L’homme d’aujourd’hui ne doit-il pas affronter un passé encore là et la vague envahissante du futur ? L’art de Bélasco provenant du fond des âges y retourne dans la fulguration poétisante où la Vie, selon le dire de Nîetzsche, « imprime à l’Etre la marque du Devenir ».

 

Jacques Médecin

1975

Jacques Nielloux, écrivain et poète

Bélasco et son univers fantasmagorique

 

C’est à Carros, près de Saint-Paul-de-Vence, que j’aurais voulu la rencontrer, au cœur de ces paysages clairs et reposants où elle aime travailler pour s’évader de son décor parisien, non loin du Bois de Boulogne.

 

C’est le Faubourg Saint-Honoré qui a été le lieu de notre rencontre, dans le havre accueillant de la galerie Drouant qui a le mérite d’offrir à l’amateur d’art cette ambiance vaste et feutrée où l’œil promène à l’aise sa rêverie. Et Dieu sait si le rêve s’impose pour apprécier les toiles de Bélasco.

 

Je crois bien que la première parole que je lui ai adressée a été pour lui exprimer ma surprise de la voir si différente, dans son allure et dans son comportement, de l’œuvre qu’elle nous propose. Il y a cette femme jeune, toute joie, avec le regard vif, la chevelure flamme, le rire qui fuse chaque instant, l’abondance des gestes qui appartient aux gens heureux, et puis il y a cette peinture toute en fulgurances éperdues, en orages désirés ou non, en symphonies de ténèbres, fruit d’une apocalypse personnelle dont la solitude cosmique éclate comme une menace ou s’apaise dans l’envoûtement.

 

« J’ai une passion pour la mer », me dit Bélasco. Cela se voit… et non seulement la mer, mais aussi toutes les eaux bruissantes et leurs jeux, les tempêtes, les noces grandioses des vents et des marées, toute cette fantasmagorie des éléments en fuite, en chute, en feu, dans une aura d’éternité où la figuration humaine est presque inexistante. Et tout cela est peint dans l’enthousiasme, ce qui traduit sans conteste une émotion permanente ressentie en secret et dont les sources seraient à découvrir sous on ne sait quel climat freudien ?…

 

Comme le dit Francis B. Conem dans l’Amateur d’Art, qui a souligné l’exposition Bélasco chez Drouant : « On n’est pas d’avantage surpris de découvrir qu’elle vit dans une atmosphère et dans un décor peu ordinaires, où la fantaisie et le désordre font bon ménage. On ne s’imagine pas, en effet, une Bélasco prisonnière du quotidien ».

 

« Je suis mariée et mère de famille, me dit-elle, mais je m’arrange et les choses s’arrangent aussi d’elles-mêmes, pour que mon entourage, non seulement n’en souffre pas, mais y trouve agrément ». Ainsi, la fantaisie et le désordre font bon ménage pour cette française bien parisienne qui a fait ses premières armes à l’Ecole des Beaux-Arts et à la « Grande Chaumière », jusqu’au jour où elle en a eu assez de dessiner des têtes et des pots en plâtre… Puis, la soif des voyages s’est emparée d’elle et, pendant vingt années, elle a visité à peu près le monde entier, du Japon à l’Afrique, des U.S.A. à l’Amérique du Sud en passant par les Philippines et le Moyen-Orient… sans doute pour mieux entrer en contact avec les éléments ciel, terre et eau, si nécessaires aux paysages de son univers intérieur.

 

Depuis 1960, Bélasco est connue en France et dans de nombreux pays étrangers. Ses expositions se situent à Paris, Musée d’Art Moderne, Salon Comparaison, Salon Grands et Jeunes, Terres Latines, Salon d’Automne ; au Havre et à Grenoble, les Maisons de la Culture ; aux U.S.A., Whitehouse Galleries (New-York), Galerie du Jonelle (Palm Spring) ; au Japon, Musée d’Art Moderne Ueno et Salon Nikka-Kaï à Tokyo ; au Danemark, Salon Majud- tillingen et Galerie Kasler à Copenhague ; en Italie, Centre de Recherches Esthétiques de Turin, Salon de l’Art Graphique à Ancone. Au printemps de 1971, ce sera Bruxelles… En 1968, elle a obtenu la Médaille d’Or de « l’Annuale Italiana d’Arte Grafica ».

 

Le graphisme de Bélasco est audacieusement personnel et il serait vain d’établir des comparaisons. C’est une poésie savoureuse et déchaînée où les noirs triomphent, certes, mais où les couleurs superbes, hallucinantes ou éthérées flambent à l’improviste. L’inspiration est aussi très personnelle, bien que de temps à autre, un motif extérieur marque son empreinte la musique du Chant des Oiseaux, de Messiaen ou celle de La Mer, de Debussy, par exemple. Un jour, peut-être, elle se remettra à la lithographie (dont elle a peu usé) et à l’illustration ; la revue « Planètes » et ses planches dessinées la tentent à cause, bien sûr, de cette trame-fiction qu’en admiratrice de Wells et des ouvrages d’anticipation elle goûte particulièrement. Je souhaiterais, et je le lui ai dit, que les Illuminations de Rimbaud ou Les Chants de Maldoror de Lautréamont puissent entrer dans le climat favorable à sa création ; la fantaisie et le désordre de Bélasco pourraient y trouver des images nouvelles, tant l’accord préalable me parait évident.

 

En attendant, émerveillons-nous des fantasmagories de Bélasco, laissons-nous envahir par ses fleuves et cyclones, écoutons ses dialogues du vent et de la mer… cela en vaut la peine.

 

Jacques Nielloux

André Parinaud, journaliste, chroniqueur, critique d'art et écrivain

Bélasco

 

C’est avec Wagner et Debussy que Bélasco oublie le plus aisément notre monde pour pénétrer dans un univers de force pure.
La musique, non seulement, rompt le lien sensuel avec le réel mais déclenche les sources d’une inspiration vibrante. Elle découvre, alors, son aventure et son espace, le monde des structures rythmiques.
Avant tout la poésie des formes et des couleurs, des jaillissements, des taches — et ses toiles deviennent cosmiques.
Sa magie est dans la ligne de Gustave Doré, de Ernst, de Gustave Moreau et elle parvient, avec une figuration, â nous faire participer à la puissance du rêve qui l’habite.
C’est qu’elle traduit, d’abord son émotion, le flux et le reflux de la vague qui le possède.
Sa sorcellerie est amour, voilà son secret.

 

André Parinaud

Lyrisme fantasmagorique

 

 Ce que l’on remarque en premier chez Danièle Bélasco, ce sont ses cheveux roux, puis son rire et finalement on découvre que cette grande et belle femme et mère de famille a voyagé dans le monde entier au cours des 20 dernières années, après avoir étudié aux Beaux-Arts et à la Grande Chaumière.

 

Bélasco est modeste à propos de son travail et n’en parle que si on lui demande. Cultivée, un globe-trotter, heureuse et belle, elle garde secret son travail de peintre, c’est-à-dire anxiété, tension, sensibilité, et différence.

 

Sa peinture ne lui ressemble pas, dans le sens où cela semble être l’opposé, une sorte de poésie non apprivoisée et hallucinante, abandonnée aux éléments, aux vents, les vagues d’un lyrisme superbe.

 

Dans ses tableaux elle nous dit qu’il y a un monde d’émotion permanente, de fantasmagorie, de désordre et de structures où le pouvoir humain seulement a ce fantasme ; et ce n’est pas notre dernière surprise de noter la rigueur de son talent dans l’utilisation du noir et de l’or, dans sa manière de préparer la toile de fond, composant d’un dessin et nous offrant des nouvelles images qui rappellent les clameurs des grandes forces de la vie.

 

Bélasco expose dans les salons les plus célèbres : Comparaison, « Grand et Jeune », « Automne ». La plupart des musées dans le monde ont acheté ses tableaux : Musée d’Art Moderne de Tokyo, du Danemark : Copenhague, Turin, New York. Elle n’en parle jamais comme si elle voulait que nous oubliions son succès, et c’est seulement par hasard que vous saurez qu’elle expose en même temps ce mois-ci à Houston à la galerie Crawford, à la galerie Rotunda de Londres et à la Galerie d’Arte Cortina à Milan. Ce qui rendrait fier un artiste mais qui, pour elle, donne lieu à plus de travail.

 

André Parinaud

La Galerie

Février 1973

Le monde fantastique de Bélasco

 

Bélasco a exposé á la Galerie Drouant ses récits-peintures illustrés de poèmes de Catherine Tolstoi.

Sa peinture nous dit qu’il existe un monde de l’émotion permanente, de la fantasmagorie, du désordre des structures où les formes de lettres n’obéissent qu’á leur fantaisie.

 

Nous constatons la rigueur de son métier dans l’utilisation des noirs et des ors, dans sa façon de préparer les fonds, de composer un tableau ct de nous livrer des images nouvelles, comme le bruit des grandes forces de la vie.

 

L’ensemble des œuvres de cette exposition ressemble á une sorte de poésie déchainée, hallucinante, livrée aux forces des éléments, un lyrisme superbe.

 

André Parinaud

L’Oeil, revue d’art, n° 236

Mars 1975

 

L’art de peindre c’est le langage de l’autre, de cet être inconnu étranger qui n’a pas pris corps, hante et bouleverse nos destins.

L’art de peindre, c’est la chance donnée à la part inconnue de nos rêves.

L’art de peindre, c’est l’affirmation de notre double et l’unité retrouvée de nous-même.

 

C’est ce que me dit Bélasco, frêle, belle et souriante jeune femme qui nous parle d’un monde fantastique et nous plonge dans le mystère des origines, au cœur des galaxies ou des cellules, dans les combats titanesques ou s’affrontent les vies possibles ; mêlée sauvage de l’abominable et du sublime. Les noms qu’elle donne à ses œuvres (multiple présence, déments déchainés, commencement d’un monde, interférence céleste…) sont les formules échappées à l’intuition poétique qui confirment et baptisent les découvertes qu’elle ramène dans ses filets de grande profondeur.

 

Elle nous révèle en fait les mystères de la vie et de la mort. Elle accomplit sa vie secrète sous nos yeux. Et cet enfantement est fascinant.

 

André Parinaud

La Galerie – Jardin des Arts

Février 1975

 

Bélasco traduit dans sa peinture des pulsions qui sont autant d’énigmes sur nous-mêmes. Quelle est la source de cette puissance qui pousse un artiste à posséder le monde en le recréant ? Et nous, à vivre, dévorés par le temps inéluctable ? La réponse est sans doute dans le refus de l’esprit d’accepter l’absurde et le fatal, et de tenter de marquer de l’empreinte digitale de l’être chaque instant qui passe comme pour tenter de retenir le fluide des jours entre nos mains vides. Sur la toile blanche, Bélasco projette des explosions d’étoiles, des nébuleuses en expansion, des galaxies en tourbillon, comme si elle avait assisté à la naissance des mondes ; mais aussi bien, pourrait-on dire, des Jeux d’algues tordus par les courants des profondeurs, où les images d’épaves érodées sont celles des minéraux, des végétaux, des monstres mythologiques qui esquissent leurs formes sous son pinceau fulgurant ? Et qui peint : un homme, une femme, un androgyne ? Quelle part de nous crie silencieusement le tragique d’être devant l’inconnu ?

 

Bélasco crée en musique, et son bras est le prolongement fiévreux de l’océan sonore où elle se plonge comme une naïade, non pas pour s’isoler mais vivre au-delà de la logique rationnelle et du comportement raisonnable et parvenir à cet état second qui est peut-être l’enfance retrouvée. Ce que je sais avec certitude, c’est que Bélasco a trouvé par la peinture, l’état de grâce qui lui permet de glisser dans la vie telle une sylphide, comme si l’angoisse, le doute, l’horreur, le dégoût n’existaient pas. Son art veut nous placer à un niveau où seuls comptent les valeurs du mystère, de la poésie, du rêve qui nous proposent une entrée dans le surréel et chaque toile est comme un talisman libérateur.

 

André Parinaud

La Galerie – Jardin des Arts

Michel Tapié, critique d'art, musicien, peintre, sculpteur, organisateur d'expositions et théoricien de l'art, Directeur du Centre de recherches esthétiques de Turin

Itinéraire de Bélasco

 

L’art de ce siècle, avec Dada comme instant zéro, témoigne de cet événement exceptionnel dans l’Histoire qu’est le passage non plus d’une Ecole à une autre, mais bien d’une axiomatique à une autre axiomatique : il ne s‘agit de rien de moins que d’un changement de puissance, fait rarissime que notre Histoire n’avait pas encore connu.

Ceci est valable, je pense, pour toutes les branches de la connaissance.

 

L’art est un merveilleux témoignage à cette échelle, puisqu’il engage dans sa création comme dans sa « consommation » (perception psychosensorielle) tout le conditionnement et tous les possibles reconditionnements de nos réflexes psycho-biologiques : les cheminements de l’œuvre picturale de Bélasco sont intimement liés à cette aventure de l’art et des notions à lui liées. L’ensemble des œuvres de cette exposition montre l’itinéraire entre deux positions extrêmes axiomatiquement définissables, les œuvres intermédiaires témoignant du côté aléatoire de la recherche, du passage qu’est en fait l’intersection de ces deux sous-ensembles.

 

Chronologiquement parlant, nous voyons d’abord des œuvres témoignant d’une longue expérience acquise dans la recherche sensible d’une sorte d’évanescence de magie visionnaire. On pense à certaines recherches prophétiques de Gustave Moreau, à Odilon Redon et au «fantômisme» des anciennes aquarelles d’Henri Michaux : monde extrême de 1’« image » poussée à son pouvoir d’envoûtement extrême aux antipodes des faux problèmes du trompe-l’œil formel, la magie jouant sur une sorte de pan-spatialisme.

 

À l’autre bout de cette série, dans les œuvres les plus récentes, nous avons des propositions qualitatives d’espaces artistiques autres témoignant dans ces zones très abstraites d’un raffinement de sensibilité, et c’est un fait essentiellement artistique d’installer des qualités d’un possible humanisme autre dans l’exploration des immenses possibilités ouvertes par les possibles propositions des axiomes de l’abstraction, c’est-à-dire des «espaces abstraits» acquis sans entrer dans des détails artistiquement négligeables, il s’agit, dans l’aventure des structures, du passage d’un tridimensionnel euclidien structuré rythmiquement par des combinaisons simples de nombres naturels et de leurs dérivés à la multivalence de la topologie générale (continuité, limites, voisinages) incluant les rythmes ensemblistes des nombres au moins réels, bien entendu qualifiés dans certains de leurs possibles dépassements artistiques et seulement là.

 

Dans ce sens, l’intuition esthético-artistique de Bélasco participe dans le libre exercice de sa sensibilité propre à cette aventure qui est celle de l’art autre et cette exposition démontre que les axiomes sous-jacents, aussi abstraits soient-ils, n’excluent aucunement les libertés de l’incarnation artistique qui est le fait même de l’art et la matière première de toute possible esthétique facilitant les «lectures» qui mènent à l’enchantement.

 

Michel Tapié

Aphorisme inspiré par les œuvres numérotées 25 et 37

Le message de Bélasco

 

Le message artistique de Bélasco montre qu’un artiste de maintenant peut, installé dans le monde esthétique, exploiter en toute liberté le jeu des structures en vue d’un contenu d’enchantement où l’image prétexte définitivement dépassée ne représente plus qu’une évidence artistique parmi la multitude possible de messages esthétiques.

 

Michel Tapié

Galerie Cyrus, Paris

Dans la mesure où « l’oeuvre d’art » rayonne d’un INCANTAMENTO (enchantement + incantation), les peintures de Bélasco sont, essentiellement, des oeuvres d’art. Un phénomène esthétique particulièrement créatif de notre « maintenant », dans des pays hautement traditionnels comme le Japon ou l’Iran, est l’intersection au moins et l’union au plus entre une longue tradition encore vivante et les problèmes structurels les plus avancés de notre époque où la philosophie scientifique a provoqué un fabuleux dépassement épistémologique. L’oeuvre de Bélasco trouve le « Type » (1) artistique intuitif à cette puissance : élève du lettré Takashi SUZUKI, son message esthétique est au niveau d’une civilisation digne de ce nom parce que devenue « autre », en un fabuleux dépassement.

 

(1) Dans le sens de la théorie des types de Bertrand RUSSEL.

 

Michel Tapié

Juillet 1971

 

Dépassant l’acquis artistique de qualifications spatiales en tant qu’ensemblistes aussi « autres » que personnelles dans l’apport contribuant au dégagement de bases d’une esthétique normalement post-Dada. Bélasco n’hésite pas à avancer dans l’investigation non pas d’une simplicité liée à la belle monovalence classique, mais bien de l’indéfiniment complexe d’une multivalence tournée vers un merveilleux avenir dont les authentiques amateurs peuvent et donc se doivent dès maintenant de chercher à être heureusement soumis à d’autres enchantements rayonnant des ces envoûtants polyptiques en même temps qu’ensembles artistico-esthétiquement heureusement fermés.

 

Michel Tapié

Mars 1975

 

L’œuvre en devenir de Bélasco est protégée de tous dangers de sclérose académique par une ambiguïté elle-même en devenir constructif, pour le seul enchantement de ceux qui, aimant l’Art, lui demandent beaucoup, sinon presque tout, dans une liberté optima…… Et combien l’amateur se sent aussi libre que profondément enchanté, justement par cette liberté euphorique que l’Art propose à l’artiste et exige de l’amateur, qui aime ce qui est artistiquement et esthétiquement digne d’être aimé d’abord dans l’aventure d’intersection avec l’œuvre , puis dans un enchantement d’inépuisable continuité Bélasco continue à devenir esthétiquement, dans son authentiquement merveilleuse aventure artistique.

 

Michel Tapié

19 Janvier 1977

Gérard Xuriguera, critique et historien de l'art

Bélasco

 

Comme beaucoup d’artistes de notre époque, Bélasco a choisi de renoncer à dire l’immédiat visible pour se tourner vers l’autonomie du seul « objet-peinture », convaincue que le non-connu offre davantage de potentialités investigatrices que son contraire. Cet engagement ne sous-entend nullement que sa vision dédaigne les vibrations du monde extérieur. Au contraire, elle s’en nourrit et s’en imprègne, aussi, les inflexions dominantes, qui en tissent les fondements, dialoguent avec les grands flux de l’univers, en fardant ses œuvres d’un essaim d’harmonies et de déflagrations dynamiques d’une égale densité émotionnelle.

 

Bélasco développe donc son sentiment de l’art au plus près des rythmes cosmiques, mais en privilégiant les états de sa dimension intérieure plus que l’effusion sensorielle. Certes, la structure de ses trames relève naturellement de la spontanéité du geste, par conséquent de l’émission directe de ses sensations, mais passées au filtre d’un esprit en éveil où chaque forme épaule sa voisine dans un enchaînement concerté, instinct et raison conjugués dans le même élan régulateur.

 

D’origine espagnole, mais sans faire appel aux clichés coutumiers, Bélasco est parallèlement la légataire d’une culture séculaire, d’une manière particulière de sentir et de ressentir le vivant, dont les échos scandent son informalisme d’accents véhéments et ombrageux propres à la peinture espagnole. Elle sait néanmoins apaiser ses emportements et napper ses toiles de fines modulations qui donnent la mesure de la diversité de son registre pictural.

 

Mais la plupart du temps, ses œuvres apparaissent soulevées par de sourdes bourrasques, des formes spasmées en expansion, traversées par les éclats d’une lumière drue, le tout généralement appuyé par les non-couleurs, d’où une certaine tendance à la dramatisation des climats, atténuée par la souplesse enlevée des échanges.

 

L’ensemble de la démarche de Bélasco respire à l’aune de son inquiète spiritualité.

 

Gérard Xuriguera

Demeures et Châteaux n°85

« Arts et Gens »

Octobre 1995

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